Nous sommes en 1885-1886. Cézanne a 46 ans. Il effectué plusieurs séjours, parfois longs, auprès de ses amis impressionnistes dans la région parisienne. Auvers sur Oise, Pontoise, Médan …
Il a épousé Hortense mais ne vit plus avec elle, son père est mort. Il continue son parcours artistique dans les méandres d’une vie affective chaotique et revient sur ses terres natales. S’il a peint de nombreuses toiles à l’Estaque entre 1861 et 1886, il a désormais besoin de villages, de campagne, de nature, de Sainte-Victoire. Dans une lettre du 11 mai 1886 à Victor Choquet, collectionneur d’art et défenseur militant de l’impressionnisme, il écrit : « … Pour finir je vous dirai que je m’occupe toujours de peinture et qu’il y aurait des trésors à emporter de ce pays qui n’a pas trouvé encore un interprète à la hauteur de la richesse qu’il déploie. »
Certains disent que ces 15 mois passés à Gardanne marquent une charnière dans son travail.
Il peint trois toiles du village qui sont une production inattendue dans son œuvre, puis, de cette distance respectable, avant les approches de Château Noir ou de Bibémus, il commence à peindre le paysage, sa montagne, sa Sainte-Victoire.
Si cette montagne faisait quelques apparitions dans la peinture, provençale notamment, depuis la reconnaissance du talent de Cézanne et la notoriété qui s’ensuit elle est un emblème tant par son nom que par sa silhouette de vaisseau de pierre en Pays d’Aix. Les peintres, illustres (sauf Picasso) ou amateurs, les photographes, les cinéastes ou les auteurs continuent de raconter Sainte-Victoire, leur Sainte-Victoire.